lundi 3 mai 2010

Start a war

Nous voilà en Mai. Où suis-je ? Pourquoi y suis-je encore ? Je savais que je n'y arriverais pas. Au moment-même où j'ai recommencé, je l'ai su. On me rabache le manque de confiance, on me demande de m'imposer. C'est quelque chose de difficile à réaliser quand on a toujours vécu dans l'ombre d'un autre.J'aurais aimé être avec ces hommes il y a 65 ans. J'aurais aimé risquer ma vie pour prendre une crête infectée d'ennemis et rendre le capitaine de section fier. Voir mes copains traverser les tirs ennemis avec dans les yeux la même détermination. Entendre les éclats d'obus arracher nos vies. Aider le doc à recoudre les entailles, porter un brancard pour sauver un ami au risque d'en perdre dix. La voilà la fraternité. Le voilà l'héroisme auquel tout le monde semble se raccrocher. Mais moi, je ne suis que ce petit soldat qui se demande pourquoi il est encore en vie et pas les autres.
Ils semblent surpris, beaucoup doivent en rire. C'est la fin d'un cycle qui aura trop duré. Et j'ai dans la peau vos sourires qui se battent en mémoire du passé. Des dizaines de visages d'hommes et femmes qui ont, chacun à leur manière, envahi mon subconscient pour l'éternité, aussi risible soit-elle. Je danse avec mes souvenirs pour ne pas oublier que j'existe. Et secrètement j'espère qu'un jour l'un d'eux me demandera pourquoi. Je l'inviterais alors dans ce chalet où je me vois finir mes jours. Je le laisserai choisir un vinyle et lui servirait un café noir. Je m'installerai dans le fauteuil en chêne de mon grand-père. Je lui raconterais tout. En tremblant parce qu'il le faut. Mon monologue terminé, j'irais l'embrasser entre les yeux, là où on ne trompe personne, et je lui confierai mes brouillons. Je pourrais alors me laisser mourrir dans la moiteur de l'été, au milieu d'une nature que j'aurais toujours enviée. Mais pour l'instant j'ai vingt ans et encore beaucoup de merveilleux souvenirs à attraper.

jeudi 18 mars 2010

C'est la nuit qu'il est beau de croire en la lumière.





04h00. Je la sens arriver. Il faudrait agir vite et proprement, avaler un cachet et attendre. Mais pas cette fois. Les premiers frissons sont étrangement agréables. Elle semble satisfaite de ma résignation. Et comme à son habitude, attaque sans prévenir. Pourquoi se battre contre l'inéluctable ? Les visages se succèdent. Ces putains de gueules déformées ne m'effraient plus, faute à l'habitude. 05h00. Convulsions terminales.
Sur le tourne-disque, Tom Waits et son incroyable Nighthawks at the dinner. J'attrape une paire de baskets et un short. Une démarche chancelante que dirige un cerveau lobotomisé par la haine.

J'y suis allé. Ca aurait du être la dernière fois. Tu n'as même pas bronché. Qu'importe. La mer me souriait. J'aurais voulu y aller, y rester, m'y noyer, lui appartenir pour l'éternité. Au lieu de ça, je me suis contenté de lui parler. Une promesse. L'eau jusqu'au cou. Encore cinq mètres et c'est fini. Non, non je n'ai pas le droit. Tout détruire. J'ai peur, peur comme jamais. Quoiqu'il arrive, on survivra toujours n'est ce pas ? Les dix invincibles. Les sept. Rose, Rose... Et puis toi, toi qui m'a vaincu, toi Gon. J'avais promis une partie d'échec à quelqu'un. Il la jouera seul. Qu'importe. Il ne compte plus. Tu t'envoles. Et je reste à terre, impuissant. Interdiction ? Jamais, je continuerais, je crèverais en courant s'il le faut, mais jamais non jamais on ne m'interdira ça. Arrête de faire semblant, sois vrai, ta haine, ta haine, sers t'en. Et si un jour, tu te souviens de ce que tu m'avais promis ce soir là, alors c'est que quelque part j'aurais réussi. Et partir seul. M'attacher ? Je l'ai fait autrefois. Pourquoi se mentir, pourquoi se bercer d'illusions ? Pour nous protéger de la réalité ? Arrêtez ces conneries, vous pensez que c'est en fuyant qu'on devient quelqu'un ? Je ne vis plus, je survis. Et la prochaine fois, je ne préviendrais pas. Parce que lui, il ne l'avait pas fait. Et parce qu'il est tout. Je vais gagner cette course. Pour deviner ton regard de fierté posé sur moi une dernière fois. Et puis dans ces champs de blé, je viendrais te rejoindre. Se retrouver, enfin.

J'ai toujours eu la sensation que l'on nous cachait trop de choses, que la vie s'amusait de nos si frêles âmes, que quoi que l'on fasse, le courant de notre destin ne pouvait être vaincu. J'ai toujours cru que tout cela finirait par s'arranger, qu'il fallait laisser faire le temps. Ce sont les fondements de l'être faible que je représentais à ses yeux. Là ou les autres étaient tombés, il était encore debout. Là ou il n'y avait plus d'espoir, il était ce doux vent chaud qui remplit ton coeur de courage. Là ou il n'y avait plus rien, il était tout. Combattant de l'éternel dans le triste et maussade abri que j'offrais. Il m'a tendu la main là ou personne ne l'avait fait. Il était devenu moi, il vivait en moi, son espoir, ses souvenirs, ses rêves vivaient à travers moi. J'aurais voulu qu'il ne s'arrête jamais de sourire. Dans ce courant qui emporte chaque homme vers son destin, il faisait partie de cette élite, il était de ceux qui tentaient de rejoindre la berge, il voulait vaincre la vie, il voulait nous prouver que rien n'est plus fort que l'espoir. Quand il est parti, j'aurais voulu partir avec lui. Quand il est parti, tout ce qu'on avait construit ensemble s'est effondré avec le vent. Il est parti alors qu'il pouvait enfin apercevoir cette berge couverte de neige. Mais non. C'était fini. Il m'a laissé seul au moment ou j'avais le plus besoin de lui. Alors je pourrais vous conter les années qui suivirent, je pourrais vous parler de Kirua, de la walkyrie aux cheveux d'or, de l'espoir de Kimi, de tout. Mais non. C'est fini. C'est arrivé à en lire ces lignes que résonne dans votre tête : pourquoi ? Je pourrais vous donner la raison de ce pourquoi mais j'entretiens l'infime conviction que le peu de magie qui peine à survivre en moi s'envolerait.

mardi 16 février 2010

Ton amitié m'a souvent fait souffrir ; sois mon ennemi, au nom de l'amitié.


Six années. 2192 jours. C'est plus que suffisant pour faire son deuil. Mais qu'est ce que c'est que cette foutue coutume de "faire un deuil" ? L'être aimé n'est plus là et il est absurde de croire qu'on puisse s'en relever. On se contente de tituber, certains avec plus de grâce et d'aisance que d'autres. Et je cours derrière nos derniers souvenirs, le souffle coupé et les jambes tremblantes. Tu t'effaces. Inéluctablement. J'ai peine à redessiner ton visage fatigué de vivre. Au fond de mon coffre pourrit notre dernier polaroid. Je n'arrive même plus à regarder l'ultime vestige de notre liberté passée. Nos deux gueules marquées par l'effort dans la piscine qui nous a vu grandir. Et J. qui sourit bêtement. Enivrant bonheur. Tu ne me croirais pas si je te disais que j'ai arrêté. Tu ne me croirais pas si je te disais que les gens me rient au nez quand je leur parle de natation. As tu conscience de la difficulté de vivre ? Ce fait simple et naturel est devenu mon plus grand combat. Et je retourne machinalement ma tête à chaque fois que la peur m'écrase, cherchant sans espoir ta présence. Tu t'es trompé sur un point. Je ne suis pas éternel. Nous l'étions.

Ce que je cherche à exprimer n'a pas d'importance. Depuis 2192 jours, plus rien n'a d'importance.


Ghinzu - Turn up the Satan

samedi 6 février 2010


Comme si toute certitude s'effondrait.
Accueillant.

mardi 29 décembre 2009

On croit plonger lentement. On chute à la vitesse de la lumière.



Voilà que déjà s'installent février et sa vieille rengaine. Il n'a pas l'air de vouloir plaisanter. Cinq mois. Et le manque qui t'écrase le thorax. Ce n'est pas l'absence de l'être qui marque le plus son semblable mais l'étonnante lucidité dont ce dernier fait preuve en s'autodétruisant. Un enterrement dans les règles. Pas de mièvreries. Le silence et juste le silence. Je n'ai même plus envie d'être socialement considéré comme fréquentable. Le cinéma et la littérature sont les seuls amis dont je supporte encore la présence. Inadmissibles dires, certes. Terrifiante expérience au milieu d'une jungle de dinosaures culturels. Et ce nouveau chez-soi noyé dans l'incurable malaise.
Les justes mon cul oui.

Il m'arrive parfois de m'imaginer prophète d'une civilisation perdue, prônant la vérité de l'acte, du sentiment, des sensations. Mais il est là le problème : elle est perdue cette satanée civilisation. Et moi avec.



"Je me souviens. Si je n'oublie, car il existe aussi tout un charnier de mes anciennes cellules cérébrales, de mes cellules photographiques, de tout ce que j'ai pu éliminer, larguant ce qui m'encombre, même si les souvenirs douloureux ne font pas nécessairement partie des souvenirs encombrants. Mais toujours le souvenir entraîne l'inquiétude, la crainte de me perdre en perdant ce que je veux garder et même si je pouvais, spéléologue, m'avaler dans la caverne de ma propre gorge, descendre avec mon oeil et mon âme dans les chairs friselées, ondulées, crépues, nervurées de l'oesophage, jusqu'au plus noir, au plus profond de mes entrailles."

vendredi 27 novembre 2009

Shoot the runner.




It's gonna be all right, Nickie, go ahead. Shoot. Shoot, Nickie.

dimanche 22 novembre 2009

Needle in the hay


La nausée. Atroce moment où l'inconscient dicte vos actes. Et l'impuissance, barrage à l'existence. J'avance sur une route où les visages n'en sont pas, où les corps ne sont plus. Un cri insupportable, terrible mélange de remords et d'actes manqués. Je ne vois plus vos rires, la peur les a balayé. Le projecteur s'allume. Sur le mur défilent continuellement des souvenirs qui n'en sont pas. Qui n'en sont plus. Idéaliser, se construire un semblant de relation. Et se jeter, la folie accrochée au visage. Compter ses échecs, pleurer et puis tenter d'oublier. Se droguer d'images, de gestes et de mots sortis de l'imaginaire palpitant d'autrui. N'être finalement qu'un brouillon, où les rayures effacent nos projets d'éternels enfants. « Les gens aiment voir souffrir leurs héros » disait Bowie. Qu'à force de vouloir l'ailleurs, on devient une ombre terriblement néfaste. Parce que finalement, ce qui fait vraiment mal, c'est de lire sur le visage des autres la détresse et la haine qu'on leur inspire. Allons bon, laissons les se détruire. Et rions, puisque c'est la seule chose qu'il nous reste.


Musique :

L'album Love Comes Close de Cold Cave, résolument le meilleur truc qu'il soit arrivé à la New Wave depuis longtemps.
The XX et leur album éponyme, incroyablement sensuel.
Florence and The Machine avec Lungs, définitivement envoûtant.

Cinéma :

Nicolas Winding Refn et sa trilogie Pusher.
The Thing de John Carpenter, désormais classé pour moi bijou du cinéma d'horreur.
Imaginarium of Doctor Parnassus, parce que le temps n'a pas altéré le talent de Terry Gilliam.